C'était un soir d'octobre, l'horloge affichait dix-neuf heures. La cloche
tintait l'Angelus. Une réunion des parrains d'élèves battait son plein, où
certains parents ressemblaient étrangement à des parrains de la mafia. Le
crépuscule s'installait, accompagné par le son de la cloche de l'angélus. Face
à la porte du gymnase se dressait la statue de la Vierge et de l'Enfant, sous
son regard attentif, des petits groupes de parents chuchotaient, échangeant des
confidences à voix basse comme lors d'une messe noire. Tous étaient briefés par
un duo peu recommandable, une femme et un homme, tous deux parents d'élèves.
Depuis une semaine, ils avaient lancé leur raid numérique, mené par une
influenceuse et administratrice d'un réseau de discorde qu'elle avait créé, servant
à semer la discorde. Ironie du sort, elle avait donné à son réseau le nom de
l'établissement scolaire lui-même. La fille de cet individu qui s'affairait à
l'entrée du gymnase pour rallier tous les parents contre une seule personne,
madame Djamila Dziri, le professeur du système numérique.
"Il faut la descendre ce soir", chuchotait-il à chaque groupe de
parents d'élèves réunis en secret.
"Je ne savais pas que j'allais assister à une réunion de criminels
prêts à éliminer quelqu'un", murmura le docteur Clément, l'un des parents
d'élèves. Ce dernier, père d'un des meilleurs élèves de Djamila, était déjà
venu l'année précédente pour avertir Djamila des dangers qui se profilaient sur
les réseaux sociaux, en raison de cette Sarah, l'administratrice du réseau qu'elle
avait créé. Il connaissait la dangerosité de Sarah depuis un an, et avait
signalé le problème à l'administration qui, comme d'habitude dans l'éducation
nationale, préférait balayer la poussière sous le tapis. Ils laissaient ainsi
les pompiers pyromanes agir, poursuivant leur sinistre dessein.
"Moi non plus", ajouta madame Bertrand, une autre maman d'élève,
incrédule et ne comprenant pas ce qui se tramait.
Peu parmi les parents d'élèves étaient conscients des véritables
préparatifs. Telles des brebis égarées, ils suivaient les sombres manigances
qui avaient déjà pris forme sur les réseaux sociaux, orchestrées par Sarah,
cette personne odieuse que Djamila avait pourtant sauvée de l'échec, ou du
moins d'un niveau médiocre qu'elle peinait à atteindre. Djamila lui avait même
promis de l'aider à intégrer une école d'ingénieur. Sarah avait baptisé le
réseau de discorde qu'elle administrait du nom de l'établissement lui-même,
Saint Clair. Ainsi, les élèves se sentaient contraints de s'y inscrire, lui
offrant ainsi un contrôle total sur eux. Sarah préférait la compagnie de
monsieur El M'Deh Deh, le collègue de Djamila, enseignant la même matière.
Pourtant, ce collègue était loin d'avoir les qualifications nécessaires pour
enseigner dans le lycée, mais il bénéficiait d'une bonne réputation grâce à ses
liaisons sur les réseaux sociaux avec des élèves, tous mineurs. Entre deux
bouchées de panini et quelques gorgées de bière bon marché, il murmurait des
propos inappropriés à l'oreille des jeunes, profitant de ses réunions
informelles avec eux pendant la pause.
La situation était lamentable. Les parents étaient manipulés, les réseaux
sociaux étaient utilisés comme une arme, et Djamila était injustement ciblée.
Elle avait pourtant sauvé Sarah de l'échec et lui avait offert un avenir
prometteur. Mais ces actes de bonté semblaient s'être retournés contre elle,
avec une machination fomentée dans l'ombre.
Dans cet établissement scolaire, les valeurs éthiques semblaient s'être
évanouies. La direction était nouvelle et ignorant les problèmes sous-jacents.
Certains vendaient des diplômes du bac à des élèves fortunés qui ne mettaient
jamais les pieds en classe. Ils leur attribuaient des notes exorbitantes, des
20/20, sans qu'ils aient assisté à un seul cours, sans qu'ils aient passé les
évaluations continues, ces fameux CCF. Ne pas passer l'un de ces deux examens
annulait le bac. Djamila avait alerté le rectorat à ce sujet, mais elle en
payait aujourd'hui les conséquences. Le directeur et son adjointe, tous deux
nouveaux, semblaient ignorer ces pratiques.
La situation était explosive, les sombres desseins des parents
manipulateurs se dissimulaient derrière des conversations à voix basse et des
regards complices. Les parents conscients de l'injustice et de la manipulation
étaient peu nombreux, noyés dans une marée de moutons dociles.
Tandis que la réunion se poursuivait, les esprits s'échauffaient. Les
forces du mal semblaient prêtes à frapper, alimentées par la haine et la
calomnie distillées insidieusement sur les réseaux sociaux. Les protagonistes
de cette sinistre comédie étaient en place, mais la bataille n'était pas encore
terminée. Les consciences éclairées devaient s'unir pour lutter contre cette
injustice rampante et protéger Djamila de cette chasse aux sorcières orchestrée
par des âmes corrompues.
C'est ainsi que se déroulait cette triste histoire dans les coulisses de
l'éducation, où les faux-parrains, les manipulations numériques et les complots
se mêlaient pour tenter de briser une enseignante dévouée, de ternir sa
réputation et de saboter son avenir. Dans cette noirceur ambiante, l'espoir
devait surgir, porté par ceux qui refusaient de se soumettre à la lâcheté et à
la manipulation, prêts à affronter les tempêtes pour défendre l'intégrité et la
justice. La tension montait crescendo dans le gymnase où se déroulait la
réunion. Les regards se croisaient, les murmures se faisaient de plus en plus
audibles. Les parents se demandaient s'ils devaient se laisser emporter par
cette vague de médisance et de haine, ou s'ils devaient prendre position en
faveur de la vérité et de la justice.
Le docteur Clément, père d'un des meilleurs élèves de Djamila, refusait de
se taire face à cette injustice. Il se leva brusquement, faisant taire
l'assemblée, et d'une voix tremblante d'émotion, il déclara : "Je refuse
de participer à cette chasse aux sorcières ! Madame Djamila Dziri est une
enseignante dévouée, qui a su redonner confiance à ma fille et lui offrir un
avenir meilleur. Je ne me laisserai pas manipuler par les manigances de
quelques individus malintentionnés."
Son discours courageux fit écho dans la salle, rallumant la flamme de
l'intégrité et de la vérité dans le cœur des parents présents. Madame Bertrand,
une autre maman d'élève, se leva à son tour, son visage rayonnant de
détermination. "Nous devons soutenir Madame Dziri et faire front contre
cette cabale qui cherche à la détruire. Nous ne pouvons pas rester les bras
croisés tandis que l'injustice triomphe !"
Les paroles de ces parents révoltés résonnèrent dans l'obscurité du
gymnase, brisant le silence qui s'était installé. Les autres parents, pris de
court par cette résistance inattendue, commencèrent à remettre en question
leurs propres actions et à réaliser l'ampleur de la manipulation à laquelle ils
avaient été soumis.
La salle se divisa alors en deux camps distincts : ceux qui étaient prêts à
se battre pour rétablir la vérité et protéger l'honneur de Djamila, et ceux qui
se rendaient compte de leur complicité dans cette machination et choisissaient
de se rétracter. Le vent de la révolte soufflait dans les rangs, balayant les
doutes et les mensonges semés par les manipulateurs.
Peu à peu, la vérité se frayait un chemin, faisant vaciller les fondations
de la conspiration. Les parents conscients de la réalité des faits se
rassemblèrent autour de Djamila, formant un bouclier humain contre les attaques
diffamatoires.
L'issue de cette bataille était encore incertaine, mais l'espoir avait
refait surface. Les parents déterminés à faire triompher la vérité étaient
prêts à affronter tous les obstacles pour rétablir l'intégrité de Djamila et
faire éclater la vérité au grand jour.
Dans cet univers à l'atmosphère si sombre et étouffante, une lueur d'espoir
s'élevait, portée par ceux qui refusaient de se soumettre à la calomnie et à la
manipulation. Ils savaient qu'il faudrait se battre sans relâche, mais ils
étaient prêts à relever le défi.
Fadéla Zoubida Malti